Une nuit qu’elles n’avaient pas sommeil, qu’elles n’arrivaient pas à
dormir les lettres décidèrent de faire la fête.
Le M apporta la musique, le S des spots de toutes les couleurs, le H
la chaîne hi-fi. Les T, les A, les P furent chargées de la nourriture. Les
S, les O, les D et quelques A apportèrent du whisky et autres
rafraîchissements. Pour le décor les G firent de jolies guirlandes et
les L de très beaux lampions.
Quand tout fut prêt bien décoré, bien préparé, bien installé le D et le J
mirent de l’ambiance. « Toutes les lettres sur la piste de danse ! »
Toute la nuit elles ont dansé. Toute la nuit elles ont chanté, ont
beaucoup bu et bien mangé. Certaines se sont même embrassé ! Au
petit matin, bien fatiguées, se sont couchées sans regarder si elles
étaient bien dans leur lit.
A neuf heures comme chaque matin Madame Archive est arrivée.
Comme chaque jour elle vient ici pour y classer, par ordre
alphabétique, plein de dossiers. » Mais que s’est-il passé ? Tous mes
dossiers sont mélangés ! On dirait qu’il y a eu une tempête ! » Pas un
instant elle ne pouvait imaginer que les lettres s’étaient amusées.
Elle commençait à remettre de l’ordre quand elle crut voir avec
surprise que lettres s’étaient assemblées :
« SANS NOUS QUE SERIEZ VOUS » « IMAGINEZ UN MONDE SANS
LIVRE » » A BAS L ORDRE ALPHABETIQUE » » LETTRES DE
TOUS LES PAYS MELANGEONS NOUS »
» Je deviens folle ! » se dit-elle. « Les lettres ne peuvent pas laisser de
message ! » Elle se dépêcha de ranger, classer, trier tous les dossiers.
Quand tout fut remis à sa place elle se rendit à la machine à café.
Elle y rencontra sa collègue à qui elle posa ces questions : « Où
croyez-vous que nous en serions si nos ancêtres n’avaient pas
inventé les lettres ? Que serait le monde sans les livres, sans les
journaux, les magazines ? Pourquoi mais pourquoi donc tous les
pays du monde n’ont-ils pas tous les mêmes lettres ? » Sa collègue la
regarda étonnée et lui répondit : » Vous m’en posez de ces
questions ! «
Toute la journée Madame Archive a réfléchi… A 17h avant de partir
elle mit une feuille en évidence sur son bureau. Sur cette feuille elle
avait écrit :
SANS VOUS LE MONDE N EXISTE PAS
Au moment de fermer la porte elle ne put s’empêcher de dire :
« Bonne nuit ! »