« Tu es en vacances Petit Poisson Rouge ? Qu’est-ce que tu deviens, on ne t’entend plus ? Tu bulles ? Tu n’es pas malade au moins ? »
C’que vous êtes gentils de prendre de mes nouvelles ! Pour rassurer les uns et les autres, je pourrais vous raconter toute la beauté du monde, de l’espace infini qui me file le vertige, des étoiles filantes, des petits matins qui sentent bon la vie et des heures qui se figent. Bonheur insaisissable. De la douceur du vent sur mes écailles, de l’amour de mon banc, du soleil qui me chauffe, je pourrais vous en parler pendant des heures entières. Si je suis resté muet ces derniers temps, c’est parce que vous êtes en vacances. Je ne voulais pas vous les gâcher mais, si vous insistez …
Je voudrais hurler pour tous ces étrangers qui se noient.
Cruel.
De tous les dangers qu’ils ont dû traverser.
Mortels.
Je vous raconterais bien
usines, hôpitaux ou hôtels
en grève.
Et puis tant qu’on y est
les agriculteurs
qui crèvent.
Je voudrais dénoncer
les femmes assassinées
les enfants violentés
les esprits asséchés
empêchés de penser
plus d’rêve.
J’ tiendrais à rabâcher
sur les peuples
affamés, assoiffés,
ligotés, bâillonnés,
torturés
qu’on achève.
Je souhaiterais m’épancher
sur nos jeunes et nos vieux
sur tous ceux qui ne peuvent
mêm’ pas
une semaine ou deux
profiter du soleil.
s’faire la belle.
Je pourrais vous parler
économie
écologie
sociologie
et tous les autres gros mots en « ie »
ennui.
Je n’pourrais m’empêcher de gueuler,
en jaune, rouge et vert
colère, honte et chagrin.
Mais puisque c’est les vacances,
pas de violence …
Le temps de l’insouciance …
Pendant encore quelques temps …
Profitez- en, profitons-en …
La rentrée arrive…
J’espère que vous avez fait le plein de vitamines, de bonheur pour au moins plusieurs mois, que vous avez bien repris des forces, il va vous en falloir, il va nous en falloir, beaucoup, à tous.
Bises et bulles et encore merci de prendre de mes nouvelles !